Remarque préliminaire: je souhaite démarrer ce blog en partageant un texte rédigé environ 10 jours après le premier discours d’Emmanuel Macron sur la crise du coronavirus, le 12 mars 2020. Il s’agit d’un article que j’avais proposé à un blog mais qui avait été refusé car, à juste titre, il ne s’agissait pas d’actualité locale mais d’un sujet national. Il était donc resté au stade d’échanges privés par e-mail ou messagerie. Je le partage donc aujourd’hui dans une série de trois articles. Je n’y ai apporté que des corrections mineures sur la base de remarques pertinentes qui m’avaient été faites à l’époque, en veillant à n’introduire aucun anachronisme.

Dans son discours du jeudi 12 mars 2020, Emmanuel Macron a employé une rhétorique guerrière qui laisse présager que la situation de crise liée au coronavirus COVID-19 pourrait être exploitée pour imposer aux Français des mesures qui changeraient profondément notre modèle économique et social. Connaissant la capacité de Macron à présenter comme un progrès des mesures injustes et contraires aux intérêts du peuple, dans le seul but de suivre avec zèle la politique de l’Union Européenne, il y a de quoi être inquiet.

Cette situation exceptionnelle ressemble à la « stratégie du choc », telle que la présente la journaliste et essayiste canado-américaine Naomi Klein.

Qu’est-ce que la stratégie du choc ? Est-elle en train d’être appliquée en France ? Quelles sont les conséquences possibles ? Examinons cela ensemble.

La stratégie du choc

« La Stratégie du Choc » est un livre de Naomi Klein, adapté en documentaire. La stratégie décrite par l’auteur consiste à utiliser le traumatisme subit par une population pour imposer des mesures économiques et sociales qui seraient inacceptables en temps normal. Elle se déroule en trois étapes, qui peuvent parfois se chevaucher :

  1. Saisir l’opportunité que représente un choc tel qu’une guerre, une crise économique ou une crise sociale. A défaut, le provoquer (la CIA sait parfaitement le faire).
  2. Une fois la population suffisamment traumatisée, mettre en place les mesures souhaitées.
  3. La contestation étant inévitable, la réprimer par tous les moyens.

Le documentaire suivant explique très bien cela:

Les mesures économiques et sociales, dites néolibérales, sont issues de la pensée de Milton Friedman, professeur d’économie à Chicago à partir de la fin des années 40. Il s’agit principalement de l’interdiction du contrôle des prix, de l’interdiction des taxes d’importation, de la privatisation des services publics et de la disparition de l’état providence. Milton Friedman a eu de nombreux disciples, appelés les « Chicago Boys », qui ont appliqué ces mesures partout où les Etats-Unis estimaient que cela pouvait servir leurs intérêts.

L’auteur présente plusieurs pays où cette stratégie a été mise en place, à commencer par le Chili. Suite à l’élection de Salvatore Allende le 4 novembre 1970, des entreprises américaines voyaient leurs positions menacées par des privatisations. Cette situation était inacceptable pour le Président américain Nixon qui demandera à la CIA d’agir. Le coup d’état du Général Augusto Pinochet sera soutenu par les Etats-Unis et aboutira au renversement du régime socialiste d’Allende le 11 septembre 1973. Pinochet était sensible aux idées de Friedman, qui se déplacera en personne au Chili. Ses idées seront mises en application avec pour conséquences une explosion de la pauvreté. La répression de la contestation sera féroce avec la mise en place de camps de concentration.

Autre cas, plus récent, l’Irak. L’image de Colin Powell brandissant un « tube d’anthrax » à la tribune lors d’un sommet des nations unies est encore dans tous les esprits. Cette « fake news » aboutira à l’invasion de l’Irak par l’armée américaine. Deux semaines après son entrée en fonction, le « gouverneur » américain prendra les premières mesures néolibérales en faveurs d’entreprise américaines. Le conflit s’enlisera, aboutissant à la disparition d’un état laïque, au renforcement de la présence terroriste en Irak et à des centaines de milliers de morts.

Qu’il s’agisse de guerres, de coups d’état ou de catastrophes naturelles, à chaque fois, la même logique est appliquée, pour mettre en place les mêmes mesures et provoquer les mêmes conséquences : un appauvrissement du plus grand nombre au profit d’intérêts privés, souvent étrangers, en particulier américains. Et pourquoi ne pas exploiter une épidémie?